Depuis le début du mois, plusieurs internautes expliquent recevoir des appels à l’aide inscrits sur des papiers glissés dans leurs commandes SHEIN.
C’est sur l’application TikTok que le hashtag #Sheinhelpme s’est développé. Plusieurs utilisateurs filment les habits reçus par colis, sur lesquels des étiquettes indiquent des messages tels que « Need your Help », soit « Besoin de votre aide » en anglais.
So after seeing tik toks about SHEIN workers begging for help, I decided to check my clothes I purchased and sure enough it’s true, and the responses from their customer service is even more sad and worrisome pic.twitter.com/ZZtc9ddBAi
— maddie🥀 (@mciampittiii) June 11, 2022
“SOS ! SOS ! SOS ! Nous sommes détenus à la prison de Xiangnan à Huzhou, en Chine, et nous produisons depuis longtemps des vêtements destinés à l’exportation. Nous travaillons 15 heures par jour, et nous mangeons la même nourriture que les cochons et les chiens, et nous cuisinons comme le bétail et les chevaux. Nous appelons la communauté internationale à condamner le gouvernement chinois pour cette violation des droits de l’homme !” indique l’un des messages insérés.
@nohroe15 They need help. #stopfastfashion #boycott #fypシ #fyp
La marque a réagi à ces messages, en expliquant que l’aide est nécessaire pour « laver les vêtements de façon adaptée. » Cependant, beaucoup d’habits ne présentent pas ce genre de message sur leurs étiquettes. SHEIN a également assuré ne pas imposer de travail forcé aux enfants, en précisant ne pas tolérer ce genre de politique.
@shein_official Recently, several videos were posted on TikTok that contain misleading and false information about SHEIN. We want to make it very clear that we take supply chain matters seriously. Our strict Code of Conduct prohibits suppliers from using child or forced labor and we do not tolerate non-compliance.
@mattessss Reply to @shein_official
Un géant de la vente en ligne
Il y a bien quelques années déjà que la fast fashion est dans le viseur du non respect des droits humains. SHEIN, mais aussi Nike ou Zara sont pointés du doigt, accusés d’exploiter les citoyens chinois travaillant dans le textile, notamment la communauté ouïgoure .
Depuis le printemps 2021, l’application SHEIN est la plus téléchargée dans la catégorie shopping aux États-Unis, devant Amazon.
SHEIN pèse plus que Zara et H&M réunis. C’est aussi l’une des enseignes les plus polluantes au monde. Elle vend en grande majorité aux moins de 25 ans. Et d’après une étude réalisée cette année, elle représente environ un quart des émissions de CO2 des adolescentes françaises.
Chaque jour, plus de 6 000 nouveautés sont proposées sur le site, et autant dire qu’il y en a pour tous les goûts. D’ailleurs, de nombreux produits repérés sur les défilés ou bien fabriqués par de petits créateurs sont « plagiés » par la marque chinoise. Bien que la qualité ne soit pas forcément au rendez-vous, leurs prix défient toute concurrence et les adolescents en sont fans, surtout à l’heure où le pouvoir d’achat ne cesse de diminuer pour les Français.
La fast fashion produit en moyenne 65 000 produits par an, ce qui implique une main d’œuvre nombreuse, mais surtout rapide. Pour un salaire moindre, les employés doivent produire des vêtements à vitesse record. L’ONG suisse Public Eye a expliqué dans un rapport “Pour tenir le rythme, les travailleurs et travailleuses doivent généralement trimer 12h par jour, 24 à 28 jours par mois”. Les employés travaillent en moyenne entre 11 et 12 heures par jour, avec un seul jour de congé par mois. Cela représente plus de 75 heures par semaine. Ils n’ont ni contrat de travail, ni sécurité.
Les consommateurs demeurent mitigés, car malgré les émissions carbone, recevoir beaucoup de vêtements pour peu d’argent est le meilleur moyen de suivre les tendances. SHEIN, c’est la 5e marque la plus consommée par les ados, derrière notamment McDonald’s en premier, et Amazon en 4e.
La Chine sur la voie de l’exploitation
« A la saison des récoltes, des travailleurs arrivent en train d’autres provinces. Et au sein du Xinjiang, il y a aussi des travailleurs ruraux de tous les groupes ethniques qui ramassent le coton parce qu’ils le veulent, parce qu’en un mois ils peuvent gagner plus de 10.000 yuan (1270 euros). Désormais, la cueillette est majoritairement mécanisée donc nous n’avons pas besoin d’un grand nombre de ramasseurs », a affirmé la semaine dernière un porte-parole officiel de cette province, pour balayer les accusations.
Mais pour l’ONG Projet pour les droits de l’Homme des Ouïghours (UHRP), basée à Washington, « les chaînes d’approvisionnement de la plupart des grandes marques de vêtements sont salies par le travail forcé des Ouïghours. »
Gap, Nike, Adidas, Calvin Klein, H&M, Zara, Puma, Uniqlo, Ralph Lauren, Tommy Hilfiger, Abercrombie & Fitch, Uniqlo, Fila, Victoria’s Secret ou encore Lacoste ont notamment été accusés, en mars, par l’ONG Australian Strategic Policy Institute de s’être approvisionnés « potentiellement directement ou indirectement » – entre 2017 et 2019 – auprès de structures utilisant de la main-d’œuvre ouïghoure provenant de « camps de rééducation ».
Le Royaume-Uni et le Canada ont décidé d’interdire les importations de marchandises soupçonnées d’être issues du travail forcé. De leur côté, les Etats-Unis avaient pris en décembre des mesures restrictives concernant les importations de coton du Xinjiang. Cependant, les grandes marques ne réagissent pas.