Le président de la Fédération française de football, Noël Le Graët, a démissionné aujourd’hui à l’occasion d’une réunion du Comité exécutif. Il a été nommé à la direction du bureau de la FIFA à Paris.
Une page se tourne pour la plus haute instance du foot français. Après plus de dix ans de règne, Noël Le Graët a présenté la démission attendue de son poste à la FFF. L’audit interne diligenté par la ministre des sports, Amélie Oudéa-Castara, a abouti à l’inéluctable. Visé par une enquête pour harcèlement moral et sexuel, le chef de la Fédération française de football n’était plus légitime à rester à la présidence. L’ancien président du club de l’En Avant Guingamp, âgé de 81 ans, sera toutefois pantouflé dans une autre « fédé »: la FIFA (fédération internationale de football association).
Le désormais ex-patron de la 3F avait été mis en retrait dès le 11 janvier dernier suite au rapport accablant de l’audit de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) sur son « exercice du pouvoir très centralisé » et son « comportement inapproprié vis-à-vis des femmes ». Les remontrances émanaient même de la direction générale de la fédération, à la tête de laquelle Florence Hardouin s’est mue en lanceuse d’alerte depuis qu’elle avait été écartée – elle aussi visée par plusieurs plaintes pour sa politique de gestion discutable. Si NLG n’avait pas quitté ses fonctions, il aurait pu s’exposer à une procédure de la commission de discipline saisie par le Conseil national d’éthique (CNE).
Les raisons d’une abdication
Le parquet de Paris avait demandé le 17 janvier l’ouverture d’une enquête visant Noël Le Graët pour « harcèlement moral » et « harcèlement sexuel », des griefs qu’il a démenti formellement le même jour. Les investigations avait été confiées à la brigade de la répression de la délinquance contre la personne (BRDP). Le signalement de l’IGESR quatre jours avant pour « outrage sexiste » a été le moteur du lancement de la procédure. L’agente Sonia Souid avait témoigné publiquement des comportements déplacés et sexistes du président de la FFF à son encontre. Celui-ci lui aurait fait du chantage sexuel pour qu’il accepte de l’aider professionnellement.
Les cinq membres du Conseil national d’éthique de la FFF se sont réunis le 17 février, un mois après le début de l’enquête, pour trancher sur le cas de M. Le Graët. À l’aune du travail d’investigation des inspecteurs, le président du CNE et avocat Patrick Anton et ses homologues lui ont demandé « d’annoncer sa démission formellement le plus vite possible ». Ce qu’il a fini par faire ce 28 février, mettant fin à pratiquement 12 années de présidence. Il était arrivé en 2011, consécutivement au fiasco politico-sportive de Knysna, en Afrique du Sud (pays organisateur de la Coupe du Monde 2010)
« Au vu de la gravité de la situation, le CNE demande la tenue d’un comité exécutif le plus rapidement possible, avant la date du 28 février. Le CNE s’étonne que ni le président Le Graët, ni les membres du comité exécutif n’aient pris la parole depuis le dépôt, mercredi, du rapport d’audit définitif de l’IGESR. », déclarait Patrick Anton.
Noël Le Graët pantouflé à la FIFA
Ses détracteurs auraient pu penser que l’octogénaire tirerait sa révérence, surtout au vu du dénouement de son aventure avec la FFF. Le dirigeant breton a pourtant été nommé à la tête du bureau de la Fifa, à Paris.
« Il a été nommé en raison de ses compétences, son expertise et son expérience », a déclaré Éric Borghini, président de la Ligue Méditerranée et membre du comex de la FFF.
Ses accointances avec le président de la fédération internationale étaient connues, notamment sur les questions d’organisation du Mondial 2022 au Qatar. M. Le Graët avait éludé les critiques sur les conditions d’ouvriers (au moins 6500 morts) sur les chantiers de construction des infrastructures qatariennes. Dans le même temps, Gianni Infantino tenait un discours dérisoire sur les minorités et les victimes de discrimination (les LGBT, les travailleurs sans-papiers) ou d’exploitation dans le monde.