Trois personnes étaient inculpés dans la mort du rappeur américain XXXTentacion. Ils ont été condamnés hier, après plusieurs jours de délibération, et attendent une nouvelle comparution le mois prochain.
Les faits remontent à presque cinq ans. Le lundi 18 juin 2018, au nord de Miami (État de Floride), trois hommes armés ont assailli et tiré mortellement sur Jasheh Dwayne Onfroy, aussi connu sous le pseudonyme de XXXTentacion. Le rappeur sortait d’un magasin de motos à Deerfield Beach lorsque les suspects l’ont attaqué. Ils ont également volé un sac Louis Vuitton d’une valeur de 46 000 euros dans la voiture de la victime. Un jury populaire floridien siégeant à Fort Lauderdale a délibéré pendant plus d’une semaine avant de reconnaître coupables Dedrick Williams, Trayvon Newsome et Michael Boatwright, âgés de 24 à 28 ans. Ils comparaîtront à nouveau devant le tribunal le 5 avril et encourent la prison à perpétuité.
La mort prématurée d’un artiste précoce
XXXTentacion n’avait que 20 ans lorsqu’il a été agressé à mort. Il avait sorti l’album ?, projet à l’intitulé logiquement énigmatique (arrivé à la 1ère place du classement de Billboard), 3 mois avant le meurtre. Certains de ses titres sont rapidement passés à la postérité, peut-être favorisés par le contexte de sa disparition tragique. C’est le cas de la chanson Sad évoquant la thématique du suicide très prégnante pour ce rappeur torturé. Il a fait connaître son art via la plateforme musicale Soundcloud, diffusant ses mélodies mélancoliques et sombres aux samples (échantillons sonores) mémorables, comme sur le single Jocelyn Flores. Il représentait un courant alternatif du hip-hop appelé « emotrap » – relatif à l’émotion – mélangeant rap, grunge et metal selon Le Monde.
La mère de l'enfant de XXXTENTACION s'est exprimée sur le procès 🙏. pic.twitter.com/DUByXbloFl
— Hyconiq (@Hyconiqmag_) March 21, 2023
XXXTentacion avait fait publier un premier album en 2017 (17, son nombre fétiche) où il raconte dans le titre Jocelyn Flores, l’envie « de se mettre dix balles dans la tête » après le suicide d’une amie avec laquelle il cohabitait, se rappelant l’image « de son oncle jouant avec un nœud coulant ». Son passif explique peut-être la voix chevrotante qui le caractérisait tant, et lui donnait donc ce ton unique. Ce climat extrêmement anxiogène dans lequel il vivait a contribué à l’émergence d’une dépression et d’une certaine attitude rebelle. La mère de XXXTentacion s’est en outre exprimée sur sur sa mort pendant le procès, évoquant le fils qu’il a malheureusement laissé.
Une fragilité masquant une grande violence
Le milieu du hip-hop est connu pour ses nombreux morts, surtout aux États-Unis. L’idole de XXXTentacion était Tupac, assassiné à Las Vegas en 1996. Les rappeurs évoluent dans des milieux, un pays dangereux où il leur arrive de perdre la vie arbitrairement. C’est le cas de l’un des trois artistes du trio des Migos Takeoff, abattu par un joueur avec qui il jouait aux dés à Houston (Texas). Les armes circulant aisément aux « States », les personnalités médiatiques sont exposées au point que certains cherchent à les tuer gratuitement, pour la gloire. Une autre étoile montante du rap américain, Pop Smoke, a été tué de manière absurde par des inconnus après avoir donné des indications malencontreuses sur son adresse.
En l’occurrence, XXXTentacion était lui-même habité par la violence. Ses penchants dépressifs n’ont jamais justifié sa brutalité envers une ancienne petite amie, surtout auprès des victimes de VSS (violences sexistes sexuelles) qui se manifestaient alors beaucoup sur les réseaux sociaux via le hashtag #metoo – #BalanceTonPorc en France. Son ex-compagne l’accusait de coups et blessures pendant sa grossesse, ce qui avait poussé la plateforme Spotify a retiré ses musiques pour des questions morales ne voulant pas promouvoir des artistes ayant « fait quelque chose de particulièrement nocif ou haineux ». Une censure sur laquelle Spotify est revenu après-coup.