Le 4 janvier prochain, sortira la BD “Mediator, un crime chimiquement pur”, co-écrit pas Irène Frachon et Éric Giacometti, sur le médicament qui n’est plus commercialisé, mais qui continue de faire des morts.
La bande dessinée se propose de raconter le scandale du Médiator sous la forme d’un polar qui cependant n’invente rien. « Tout est factuel (…) il n’y a aucune place pour la fiction dans le BD », confie Irène Frachon à France Info. L’histoire de plusieurs patients y est racontée ainsi que leurs combats et leurs souffrances au quotidien, hérités des séquelles laissées par le traitement.
Irène Frachon se bat depuis plusieurs années pour l’indemnisation des victimes. La pneumologue avait alerté les autorités sanitaires dès 2007 sur la dangerosité du médicament après avoir constaté des cas d’attaques cardiaques chez des patients ayant suivi le traitement. Elle avait alors élaboré une longue étude épidémiologique qui a participé au retrait du Mediator sur le marché.
L’histoire d’un médicament ayant trompé 5 millions de personnes
Le médicament mis sur le marché en 1976 et commercialisé par le groupe pharmaceutique français Servier, a été détourné et prescrit comme coupe-faim en vue de traiter le diabète. Ce traitement prescrit à près de 5 millions de personnes a ensuite été retiré du marché en novembre 2009, après avoir été à l’origine de nombreux cas de lésions cardiaques et d’hypertension, causant des décès.
« C’est un crime industriel qui se noue dans les années 1960 : Servier invente une série de coupe-faim dérivés de l’amphétamine. Et, malgré des signes de dangerosité qui apparaissent très rapidement, Servier va tout mettre en œuvre pour empêcher le retrait de ces coupe-faim parce que ce sont des produits extrêmement rentables. »
Irène Frachon, accompagnée du journaliste Éric Giacometti, retrace l’histoire des laboratoires Servier, fabricants du traitement et condamné en 2021 à une amende de 2,7 millions d’euros pour tromperie aggravée ainsi qu’homicides et blessures involontaires. Pour cause, les laboratoires ont sciemment dissimulé les propriétés coupe-faim et les dangereux effets secondaires du médicament dans le seul but de s’enrichir.
« On a affaire à un labo qui a vendu un poison mortel en toute connaissance de cause pendant plus de dix ans, avec des milliers de morts à la clé. Je pense que ça mérite des condamnations exemplaires. »
Le 9 janvier prochain, le procès en appel du groupe pharmaceutique s’ouvrira pour une durée de quatre mois, les laboratoires Servier ayant fait appel de leur condamnation. Irène Frachon, quant à elle, attend une grande sévérité de la part de la justice française et estime que l’affaire du Mediator a participé à la méfiance du public envers les autorités sanitaires.
Un bilan des décès qui continuent de s’alourdir
Si en décembre 2010 une étude de l’Agence nationale de sécurité du médicament avait estimé que le nombre de morts à venir se situerait entre 1000 à 2000 personnes, il a été établi par le juge d’instruction en 2019 que le bilan s’élevait provisoirement entre 1500 et 2100 décès. Le juge avait également ajouté que le Mediator a entraîné entre 3 100 et 4 000 hospitalisations pour insuffisance valvulaire et entre 1 700 et 2 300 replacement valvulaire. Aujourd’hui encore, des patients ayant suivi le traitement lorsqu’il était commercialisé continuent de mourir du Mediator.