Après 9 années, les derniers militaires français de l’opération anti-djihadiste Barkhane ont quitté, ce 15 août, le Mali. Cela fait suite à la déclaration du 17 février du président Macron qui avait décidé de mettre fin à l’opération à cause des mauvaises conditions politiques et opérationnelles.
La frontière entre le Mali et le Niger a été franchie à 13 heures (heure de Paris). Le dernier détachement de l’opération Barkhane a quitté le Mali, ce 15 août, après neuf ans de lutte contre le terrorisme, a déclaré l’état-major des armées sur Twitter.
#Barkhane | Ce jour, les derniers militaires de @Barkhane_OP présents sur le sol malien ont franchi la frontière entre le Mali et le Niger. Ils provenaient de la plateforme opérationnelle désert de Gao, désormais transférée aux Forces armées Maliennes. pic.twitter.com/mducbnMP6V
— Armée française – Opérations militaires (@EtatMajorFR) August 15, 2022
C’est le président de la République, Emmanuel Macron, qui a décidé, le 17 février, de mettre un terme à l’opération Barkhane, après un début d’année 2022 difficile pour les diplomates et militaires français engagés au Mali. En effet, après la mort du brigadier Alexandre Martin, lors d’une attaque au mortier contre le camp militaire de Barkhane à Gao, et l’expulsion de l’ambassadeur de France à Bamako, le 31 janvier, la découverte de la présence des mercenaires de Wagner au Mali marque un tournant décisif.
Jean-Yves Le Drian, alors ministre des Affaires étrangères, réaffirme que les conditions pour maintenir l’opération Barkhane ne sont « plus réunies », le 14 février. Trois jours plus tard, le président de la République annonce la décision de la France de mettre fin à neuf années d’opération anti-djihadiste au Mali.
L’opération Barkhane, un échec ?
L’opération avait pourtant démarré sur les chapeaux de roue. Le 11 janvier 2013, l’opération Serval, précédant Barkhane, débutait au Mali pour lutter contre la progression du djihadisme dans le pays. 5 000 soldats français sont déployés et fin janvier, ils reprennent la ville de Gao, peuplée de 124 000 habitants et se situant au nord-est du pays, des mains des djihadistes. Le 2 février, François Hollande, alors président de la République française, est accueilli en héros à Tombouctou. Il parle de ce jour comme du « plus beau jour de sa vie politique ».

Un an plus tard, l’opération Serval devient l’opération Barkhane, le 1er août 2014, et a pour vocation la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel, en collaboration avec le Mali, le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. 8 ans plus tard, les derniers militaires français viennent tout juste de quitter le Mali, mettant fin à l’opération anti-djihadiste. Mais quel est le bilan de ces neuf années d’opération ?
Pour beaucoup, l’opération n’est pas une franche réussite, à commencer par les proches des militaires morts au cours de l’opération. 53 militaires français ont perdu la vie lors des opérations anti-djihadiste et leurs proches dénoncent un « gâchis » puisque l’opération n’a pas pu être menée jusqu’à son terme.
En effet, le but de l’opération Barkhane était d’éradiquer la menace djihadiste dans la région du Sahel et de former les forces armées maliennes (Fama) à combattre cette menace, dans le cas où elle venait, à s’intensifier de nouveau, dans le futur. Aucun de ces deux buts ne sera atteint puisque même si le nombre des Fama est passé de 7000 à 40 000 hommes en 9 ans, pour l’ancien colonel, Raphaël Bernard, la France « n’a pas été au bout de la mission » et n’a pas atteint son but ultime, qui était de « faire monter en puissance les Fama pour qu’elles soient capables de prendre en charge la sécurité de leur pays ».

Pour ce qui est d’éviter l’expansion des forces djihadistes, malgré les opérations qui ont permis de tuer Abdelmalek Droukel, chef de l’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique), Bah Ag Moussa, « chef militaire » du GSIM et Adnan Abou Walid al-Sahraoui, chef de l’Etat islamique au grand Sahel, les groupes djihadistes ont continué d’exister et de maintenir leur emprise dans la région.
Si le Mali n’est pas tombé entre les mains des djihadistes, Jean-Dominique Merchet, expliquait chez nos confrères de France Inter, le 17 février dernier, que « la menace se déporte maintenant beaucoup plus au sud ou à l’est, vers les grandes capitales de l’Afrique », comme Abidjan (Côte d’Ivoire) ou Dakar (Sénégal). De plus, le géopolitologue, Michel Galy, explique, encore chez nos confrères, que la situation devient « de plus en plus difficile militairement » au Mali, après l’implantation des forces djihadistes du groupe Katiba Macina dans le centre du pays, qui progressent vers le sud, en direction de la capitale.
Vers l’après-Barkhane
Malgré le départ des forces françaises du Mali, l’Élysée à tenu à réaffirmer l’engagement de la France « au Sahel, dans le golfe de Guinée et la région du lac Tchad, avec tous les partenaires attachés à la stabilité et à la lutte contre le terrorisme ».
D’après Michel Galy, le président français a choisi de « privilégier le Niger pour redéployer la force Barkhane sous de nouvelles formes ». Il a aussi pour but de diminuer les effectifs militaires dans les quatre autres pays dans lesquels sont présents les militaires français, à savoir, le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et le Tchad, pour pouvoir « négocier de nouvelles formes de coopération ou d’implantations militaires avec les pays côtiers comme la Côte d’Ivoire, le Togo et le Bénin ».
Cependant, précise le géopolitologue, « l’opinion anti-française monte dans toute l’Afrique de l’Ouest et en particulier au Sahel », ce qui pourrait court-circuiter les projets du président français.