Le président français a répondu à une interview de France 2 à 13h depuis l’Élysée, s’exprimant sur le projet de réforme des retraites adoptée la semaine dernière. Emmanuel Macron entend la faire « entrer en vigueur d’ici la fin de l’année ».
Depuis le début de la mobilisation contre la révision du système de retraites, le président de la République s’est montré très discret. Le 19 janvier, première journée d’appel de l’intersyndicale à manifester, Emmanuel Macron participait au 27ème Sommet franco-espagnol à Barcelone. Le 7 mars, où la France devait être mise l’arrêt, il effectuait une tournée africaine. Après entérinement de la réforme jeudi dernier, le chef d’État a seulement communiqué quelques propos lapidaires sur le mouvement social, estimant qu’il n’y a « pas de légitimité face au peuple qui s’exprime à travers ses élus » lors de la réception des sénateurs et députés de la majorité à l’Elysée hier soir. Il a enfin pris la parole au journal de 13h aujourd’hui.
« On ne peut accepter ni les factieux ni les factions » ni l’attitude de « groupes qui utilisent la violence », a soutenu Emmanuel Macron sans évoquer ici la répression policière (dénoncée hier par Amnesty International).
Les journalistes de F2 Julian Bugier et Marie-Sophie Lacarrau ont demandé à Emmanuel Macron de s’expliquer sur ces déclarations, lequel a rétorqué que « les syndicats ont une légitimité. (…) Ils sont en opposition à cette réforme. Je les respecte ». Mais « on ne peut accepter ni les factieux ni les factions ». Et de comparer ensuite certaines manifestations à l’invasion du Capitole par des pro-Trump en janvier 2021 ou à celui de la place des Trois pouvoirs à Brasilia par des pro-Bolsonaro il y a plus de deux mois (suite à l’investiture des nouveaux présidents américain Joe Biden et brésilien Lula). L’intervention du Président aujourd’hui va ainsi dans le sens d’une disqualification des protestations et d’une acceptation définitive de la réforme.
La concession d’un manque de conviction
« Nous n’avons pas réussi à partager la contrainte, ou plus exactement la nécessité, de faire cette réforme », reconnaît le chef de l’État, répétant le discours maintes fois égrené depuis que les débats sont lancés. Au rebours des analyses du Conseil d’orientation des retraites (COR), Emmanuel Macron et son gouvernement considèrent que le risque de déficit du système par répartition des retraites est réel, et qu’un nouveau projet est indispensable. Afin de tenter d’écouter les revendications de la rue et des partenaires sociaux, il a annoncé la mise en place, d’ici environ un mois, de dialogues pour discuter des conditions de travail (usure pour les égoutiers et éboueurs par exemple, fin de carrière pour les aînés et reconversion).
« C’est pourtant [Emmanuel Macron] qui avait largement détricoté le compte pénibilité, qui permet aux salariés exposés à des conditions de travail éprouvantes d’accumuler des points pour financer des formations, un temps partiel sans baisse de salaire ou un départ à la retraite jusqu’à deux ans plus tôt […]. Il a notamment réformé le financement du C2P et supprimé quatre facteurs de risques : le port de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques. Nombre de déménageurs, ouvriers du bâtiment ou coiffeurs ont ainsi été exclus du dispositif », analyse Le Monde.
La colère des Français étant due, en partie, aux effort demandés à certains plus qu’à d’autres, le Président a bien concédé le « cynisme » des entreprises qui engrangent des profits en ces temps de crise sans les redistribuer dans les salaires. Il a ainsi annoncé vouloir « demander au gouvernement de travailler sur une contribution exceptionnelle ». Emmanuel Macron ne l’a pas justifié en raison du pouvoir d’achat déclinant des citoyens, mais a en revanche jugé que les « jamais les smicards ne [l’]avaient autant vu augmenter. L’inflation des produits alimentaires atteindra pourtant bientôt +14 % depuis 2021 alors que ces revenus minimum n’ont été réhaussés que de 9 % en moyenne.
Une critique de l’opposition et des syndicats
Comme l’exécutif l’a souligné tout au long des discussions sur la réforme, E. Macron a mis dos à dos sa responsabilité de faire passer ce projet de loi « nécessaire » (malgré la contestation populaire) à l’inertie des opposants politiques et des organisations syndicales. Celles-ci, selon le Président, n’ont proposé « aucun compromis ». Une affirmation que le patron de la CFDT Laurent Berger a tout de suite réfutée sur son compte Twitter. Le chef d’Etat a déclaré qu’il renouvellerait les échanges – lors même qu’il avait refusé de les recevoir la semaine passée – avec les représentants après la mobilisation intersyndicale de demain, jeudi 23 mars, afin de trouver des axes d’amélioration de la réforme et de prolonger la réindustrialisation du pays.
Déni et mensonge ! La CFDT a un projet de réforme des retraites.
Macron 2019 l’avait compris il avait repris notre ambition d un système universelle.
Macron 2023 refait l histoire et ment sur @cfdt pour masquer son incapacité à trouver une majorité pour voter sa réforme injuste— Laurent Berger (@CfdtBerger) March 22, 2023